303/ juin 1991

Frédéric Bouglé
303 arts, recherches et créations, juin 1991

La cour 21 - rue Crébillon.

Benoit Rondot nous propose pour sa première exposition personnelle des œuvres dont l’ensemble est constitutif d’une recherche véritablement autonome. Ses Créations évoquent l’empreinte et l’essaimage à partir de traces liées à sa mémoire. Un langage s’articule autour de dessins, de peintures et d’installations que satellise la présence d’objets. Il transpose le sens des propositions qu’il affirme : report de l’objet sur le papier, papier marouflé sur la toile, épaisseur et arrondis des angles de la toile/objet.

La réitération des motifs qu’il représente, ses couleurs volontairement nuancées et effacées, accusent sa volonté de manipuler ses référents mnémoniques.

«Un regard sur un regard qui regarde la toile» souffle-t-il à un moment donné, comme il se plaît à souffler sur un des dessins repliés en paravent.

«Est-ce la mémoire du vent sur un champ de blé ?» Là où l’on devine la lumière diaphane d’une persienne.

Toujours, il soustrait l’objet à sa pesanteur originelle. Il insuffle, aux matériaux réifiés qu’il utilise, une vie soudaine.

L’objet ou le signe prend sens dans son déploiement, (entre la spirale et le décamètre qui se déplie). Il précise la forme au regard qu’on lui porte. Ces retournements invoquent la captation du regard.

Benoit Rondot condense sont travail, autour d’une prolifération raisonnée de ses repères s’agglomérant à l’espace quotidien de son existence.

À l’aide de disques anciens d’accordéonistes, il déterritorialise l’espace de la galerie. La musique, par la fascination collective dont elle se charge, façonne des lois qui s’imposent en ‘force de capture’. Lorsqu’il peint la projection d’une portion de linoléum empruntée à l’assise d’un tabouret, l’effet de capture se referme alors sur le regard du spectateur, tandis que le motif s’agrandit.